Les Assemblées de Dieu : des centenaires qui se portent plutôt bien !
Les différentes branches nationales des Assemblées de Dieu de la planète (WAGF) viennent de clore la célébration du centenaire de la création de cette dénomination pentecôtiste, la plus importante aujourd’hui avec une estimation de 67 millions d’âmes dans le monde.
L’événement s’est évidemment tenu aux États-Unis, là où quelques 300 pasteurs avaient jeté les bases de ce mouvement religieux en avril 1914. Aujourd’hui, les 140 fédérations nationales sont indépendantes, et tissent simplement entre elles des relations de fraternité et d’entraide.
J’aurai plus tard l’occasion de revenir sur la création et l’évolution de cette dénomination, qui ne représente qu’un des volets du pentecôtisme «classique», et qui est particulièrement bien représentée dans le monde francophone.
Une des caractéristiques des Assemblées de Dieu (en anglais Assemblies of God, AoG) est qu’elles sont en effet minoritaires dans le pentecôtisme des USA, où elles demeurent largement distancées par leurs soeurs des Églises de Dieu (COGIC) qui regroupent près de 6 millions de croyants contre un peu plus de 3 millions. C’est au niveau international que les Assemblées de Dieu, très tôt engagées dans l’effort missionnaire, ont développé leur très net avantage numérique. Les différentes fédérations nationales (140 aujourd’hui) sont indépendantes entre elles, conservant des liens de fraternité et d’assistance. Le modèle habituel de direction est assez complexe, associant l’indépendance théorique de chaque communauté locale (forme congrégationaliste) avec le contrôle d’assemblées délibérantes des pasteurs (pouvoir synodal), déléguant la gestion quotidienne des problèmes communs à des responsables régionaux ou nationaux élus, qui peuvent être éventuellement assez directifs. Les contestataires se plaignent alors, parfois à juste titre, de «dérive épiscopale». Ce qui est sûr, c’est que la culture propre aux Assemblées de Dieu est réfractaire au vedettariat et à l’individualisme de «ministères internationaux indépendants». Le site internet de l’Église mère, aux États-Unis, rappelle constamment que « l’essentiel, c’est l’assemblée locale ».
On aurait pu croire qu’une telle structure aurait eu quelque difficulté à se développer dans une société marquée par l’émergence de leaders médiatiques. Certains ont pu pronostiquer une stagnation numérique. Il n’en est rien.
Les données numériques sur les USA présentées lors du centenaire livrent des informations précises. Au cours des 25 dernières années, les Assemblées de Dieu sont passées de 15 à 67 millions de fidèles dans le monde et de 128.000 à 366.000 Églises.
Les chiffres disponibles pour les États-Unis sont d’un grand intérêt, dans la mesure où ce pays commence à être très sérieusement touché par un phénomène de sécularisation analogue à celui qui concerne la France depuis longtemps déjà. Ils sont d’autant plus précieux que nous ne disposons pas de données équivalentes pour l’Europe.
Les confessions protestantes «historiques» américaines subissent des pertes considérables, de l’ordre d’un tiers en un demi-siècle, selon une tendance qui s’accélère rapidement aujourd’hui. Durant ce temps, les pentecôtistes ont progressé de plus de 400%.
Au cours des 25 dernières années, les Assemblées de Dieu des USA ont poursuivi leur avancée, passant de 11.000 à près de 13.000 communautés, et surtout de 2, 1 millions de fidèles à 3.1 millions aujourd’hui. On aura noté que la croissance s’est faite plus par l’augmentation de la taille des Églises que par l’essaimage de nouvelles. Elle a été très régulière au cours de ces années, sur un trend positif de 1% par an environ. L’évolution générale recouvre en fait des réalités très contrastées, qui ressemblent assez à ce que l’on pourrait sans doute constater dans les assemblées de France.
1) Les jeunes restent nombreux dans les Églises, et d’autant plus que les communautés sont de taille notable. Les pentecôtistes sont moins touchés que les autres évangéliques qui s’inquiètent, à l’exemple des Églises baptistes du Sud des USA, par l’érosion du nombre de leurs jeunes des générations de «millenials» (génération Y). Or cette même classe d’âge a fourni 20 % de la croissance pentecôtiste des 10 dernières années.
2) Les assemblées rurales et celles des petites villes souffrent. Vieillissement, exode professionnel et conservatisme liturgique s’y conjuguent de façon négative.
3) Les pôles de rapide expansion se situent dans les villes, particulièrement celles qui accueillent des populations latino-américaines qui se tournent en nombre vers le pentecôtisme. A ce propos, la composition ethnique des assemblées a considérablement évolué au cours du dernier quart de siècle. On a longtemps considéré que les Églises pentecôtistes américaines étaient aussi ségrégées que les autres : les Églises de Dieu étaient noires et les Assemblées blanches… Mais la conversion des latino-américains, associée à l’internationalisation du mouvement, aboutit aujourd’hui à faire des Assemblées de Dieu des USA la fédération des Églises les plus intégrées du pays : 40% de leurs adhérents appartiennent maintenant à des minorités ethniques, dont 20% de sud-américains et 10% de noirs, c’est-à-dire une composition à l’image de la nation. Ce sont les grandes et très grandes congrégations urbaines qui fournissent l’essentiel de la croissance globale.
4) Au cours des vingt dernières années, les divers indicateurs de la vie paroissiale ont fortement évolué, mais là encore, de façon fort différente selon les lieux et les sensibilités locales. Parmi les plus fortes progressions, on trouve les conversions, les baptêmes par immersion (+ 4% en 2013), le nombre de pasteurs (+ 1,5%), l’assistance aux cultes (+ 2%) et aux réunions thématiques (jeunesse, regroupements de quartiers). Par contre, l’assistance aux services de l’après-midi, quant ils existent encore, est faible. Les réunions en semaine sont moins suivies. Ce glissement peut être lié à l’abandon d’une certaine tradition de contrainte pastorale et d’encadrement du temps paroissial qui étaient sans doute encore le principal handicap des Assemblées de Dieu des USA il y a 20 ans. Cette liberté actuelle a apaisé les conflits internes et favorisé une fraternité qui est aujourd’hui un atout des pentecôtistes concernés. Signe intéressant, le nombre et le taux de baptêmes du Saint-Esprit (+3% en 2013) sont en notable croissance chez les pentecôtistes américains. Une évidence qui était loin d’être à l’ordre du jour il y a peu !
Sources :
Pew Research Center, US Religious Landscape Survey.
George O Wood : Why we celebrate the AG’s Centennial, Charisma News, 8 août 2014.
Global, Diverse and Growing : The Assemblies of God at 100, Charisma News, 5 août 2014.
Assemblies of God : A Growing US Denomination, The Christian Post, 7 juillet 2014.
Black and White Pentecostals Mend 100-Year Racial Rift, Christianity Today, 17 février 2014.
Ca fait vraiment plaisir de savoir qu’étant à un bout du monde on n’a des frères et sœurs à un autre bout de ce monde. la célébration de ce centenaire m’a fait comprendre que j’ai une très grande famille en Jésus, que notre SEIGNEUR JESUS soit bénie pour cette grande oeuvre qu’il nous aide à continuer
C’est étonnant de savoir que les Assemblées de Dieu ont un aussi grand nombre de membres dans le monde entier.
La gloire simplement à Dieu
Merci pour cette synthèse trés intéressante , et qui concerne essentiellement l’évolution des ADD des Etats Unis .
A quand une étude la plus complète possible sur les Assemblées de Dieu en France ?
Peut être une telle étude existe t elle déja ?
Merci de votre intérêt.
Il n’existe pas, à ma connaissance, de synthèse publique sur les Assemblées de Dieu de France. En ce qui concerne les divers pentecôtismes en France, j’ai réalisé un travail sur l’ensemble de cette sensibilité qui a été publié dans le compte-rendu du colloque de novembre 2010 à Paris : « Les protestants en France, une famille recomposée ». Je pense y revenir à l’occasion sur ce blog.
A bientôt donc peut-être…
Merci pour ce travail de recherche. Bon courage Jean-Yves