Martha Hartmann (1888-1968)

    Martha Hartmann est un exemple rare d’émergence de rôle spirituel marquant reconnu à une femme au sein du pentecôtisme français naissant, dans les limites pourtant strictement imparties par des Églises qui étaient  alors très réservées sur la reconnaissance de ministères féminins.

     Elle est née le 23 août 1888 à Marseille dans une famille modeste d’origine alsacienne et de confession réformée[1]. Son intelligence et son travail la font vite remarquer. Elle est admise très jeune à l’École normale supérieure de Fontenay-aux-Roses, destinée en priorité à former des institutrices. Mais Martha Harmann est une élève tellement brillante qu’elle se présente à l’agrégation féminine de Physique en 1918. Elle est reçue première de sa promotion avant l’âge de 20 ans, fait unique jusqu’alors.

     Elle connaît ensuite plusieurs affectations : Constantine (Algérie), Mende, Grenoble (lycée de garçons), Montpellier (directrice du lycée de jeunes filles en 1927) pour finalement revenir à Marseille (Lycée Saint-Charles). C’est dans sa ville natale qu’elle devient en 1934 directrice du lycée Montgrand, le plus grand lycée français de jeunes filles d’alors. Elle restera à ce poste jusqu’à sa retraite en 1953.

Lycée Mongrand (Marseille), ancien hôtel Roux de Corse puis résidence préfectorale, cour d'honneur. Photo Wiki commons

Lycée Mongrand (Marseille), ancien hôtel Roux de Corse puis résidence préfectorale, cour d’honneur. Photo Wiki commons

     L’année même de sa nomination à Montgrand, elle entend parler des réunions de Réveil du prédicateur pentecôtiste anglais Douglas Scott et s’y montre assidue. Elle fait partie des 35 premiers baptisés par immersion marseillais de l’évangéliste, le 14 avril 1935. Mlle Hartmann devient ainsi un membres fondateurs de la première Assemblée de Dieu de Marseille (et du Sud de la France) déclarée en préfecture le 25 Juin 1935 sous le nom d’Église Chrétienne de Réveil. Elle restera active jusqu’à son décès dans cette Église qui essaimera dans le sud-est de la France jusqu’à former un important réseau de communautés.

     Martha Hartmann mène de front une importante activité sur le plan paroissial et un engagement exemplaire dans le domaine professionnel, notamment au cours des années noires de la deuxième guerre mondiale. Elle maintient la cohésion de l’établissement, fait face à l’occupant, accueille des jeunes filles juives. Pour ces actions, elle est faite chevalier de la Légion d’honneur en 1949.

     Après son admission à la retraite en 1953, elle peut se consacrer entièrement à un rôle que son pasteur, Lucien Vivier, décrira comme celui d’une diaconesse, ministère alors non officiellement reconnu dans le réseau des Églises pentecôtistes françaises, mais qu’elle accomplit à plusieurs niveaux. Elle intervient dans le domaine social sous forme d’une action dénommée «œuvre charitable». Elle est en contact avec la Croix-Rouge avec laquelle elle collecte un soutien pour les nécessiteux de son Église, ainsi qu’avec les services d’entraide des Bouches-du-Rhône pour distribuer charbon, vêtements, nourriture et aide financière aux plus nécessiteux et particulièrement aux personnes âgées.

     Sur le plan spirituel, elle crée et prend en charge une sorte de feuille de liaison théologique destinée aux pasteurs, qu’elle alimente de traductions de revues pentecôtistes internationales comme Redemption Tidings ou Pentecostal Evangel. Elle collabore par ailleurs au journal Viens et Vois, organe des Assemblées de Dieu de France, dont elle est relectrice et contributrice. Elle traduit également un ouvrage d’histoire de l’Église et produit un écrit sur Israël.

     Elle décède à Marseille dans sa 80e année, le 29 Mai 1968.

 Romuald Hanss et Jean-Yves Carluer

 [1] Son acte de naissance porte exactement «Catherine Martha Hartemann», fille de François Louis Hartemann, marin, et de son épouse Marguerite Joséphine Leh, lingère. La graphie « Martha Hartmann » figure sur les autres actes.

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5 réponses à Martha Hartmann (1888-1968)

  1. Gérard Fo dit :

    Cher Jean-Yves
    Je viens de lire avec intérêt votre article consacré à Martha Hartmann.
    Justement je prépare un reportage sur les 80 ans de l’ADD Sébatopol, qui paraîtra dans le <pentecôte de décembre ou de janvier.
    Pourrais-je inclure cet article avec les références ?
    Merci pour cet excellent travail !
    Cordiales et chaleureuses salutations
    G Fo

  2. YEREMIAN PIERRE dit :

    Puis je me permettre d’ajouter que Mademoiselle HARTMANN comme nous l’appelions à Sébastopol a participé comme enseignante de l’AT et « Histoire de l’Eglise » aux cours bibliques organisés par le pasteur Lucien Vivier le samedi aprés midi durant 2 années ; une sorte d’école biblique intégrée pour jeunes gens et jeunes filles désirant servir Dieu .
    Ses cours étaient d’une qualité exceptionnelle , d’une densité remarquable , avec la pédagogie et l’énergie qui faisaient d’elle une enseignante hors pair .
    Nous la craignions , nous l’aimions ;
    la feuille de liaison était également distribuée par ses soins à l’entrée de l’église le dimanche matin et envoyé gratuitement à ses frais à tous les pasteurs des ADD.

  3. CACOUAULT Marlaine dit :

    Cher monsieur,

    Existe-t-il des archives de Celle Hartmann, des témoignages sur elle… en tant que directrice. C’est en effet sous cet angle que je m’intéresse à elle et à sa carrière. Merci pour les informations contenues ici, très sincères salutations, Marlaine Cacouault
    Professeure émérite, Université de Poitiers

    • JeanYves-Carluer dit :

      Bonjour !
      Je n’ai rien trouvé de plus, hélas, que ce que j’ai publié sur mon blog. L’historien du futur pourra disposer de nouvelles informations quand les délais de communication des archives publiques seront prescrits. Ce n’est pas pour tout de suite…

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